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L’outil sophrologique dans la pratique psychothérapeutique 2/2


3. Réception de l’outil


Je suis établi depuis septembre 2021 dans un milieu rural en France qualifié par les professionnels de santé comme « un désert médical ». Je travaille dans une maison de santé pluridisciplinaire et me rends à domicile à la demande. Je propose également des consultations à distance, mais je n’ai pas eu de demande à ce jour. En plus de cette pratique variée, je discute et collabore avec des praticiens médicaux et paramédicaux, ce qui me permet d’échanger tant avec les clientes et clients qu’avec les professionnels sur les pratiques thérapeutiques « alternatives ».

D’une manière générale, une vaste majorité ignore ce qu’est la sophrologie. Parfois on en a entendu parler car on connaît une personne qui « en a fait ». Parfois, la sophrologie, comme l’hypnose, les traitements énergétiques, « ne devraient pas être proposés », car « c’est dangereux, et ce sont des charlatans, ceux qui la propose ». Souvent la sophrologie est synonyme de relaxation. Et c’est tout.

Cette perception de la discipline renvoie, à mon avis, à d’autres schémas cognitifs sans parler des représentations personnelles du monde et des croyances de chacune et chacun.

Aussi, la plupart du temps j’aborde le sujet de la sophrologie :

- Lorsqu’on m’interroge dessus, généralement après que ma carte de visite a été lue recto-verso ;

- Au cours d’un protocole d’accompagnement, et pas souvent lors du premier rendez-vous.

D’une manière générale, les personnes qui viennent me voir semblent me déléguer leurs problématiques et paraissent me faire confiance dans les outils que je leur transmettrais au cours de la psychothérapie : des clientes et clients qui avaient entendu parler de la sophrologie, seule une résonnait à mes propos car elle avait « lu » dessus, mais n’avait jamais vécu une séance.

Cette attitude m’a encouragé à faire preuve de discernement, d’esprit critique et de discrimination entre les outils de la panoplie sophrologique : je n’allais pas systématiquement déballer toute la boîte à outils sous prétexte que la sophrologie résoudrait tout. Au contraire, il m’a fallu choisir lesquels utiliser et en synchroniser le déploiement selon le rythme de progression du client ou de la cliente.

J’ai observé deux phénomènes particulièrement flagrants :

1. Les individus qui viennent me voir découvrent qu’ils ou elles respirent, et leur respiration est parcellaire.

2. Les visualisations et techniques transmises permettent une autonomisation des personnes, pourvu que l’impulsion de s’autonomiser existe quel que soit l’état de la personne.


2. La respiration


Le sujet de la respiration m’a surpris car je m’attendais à ce que le milieu rural conduisait à une plus grande prise en compte du corps et à une respiration plus fluide car plus spontanée, due aux efforts physiques induits par un mode de vie plus proche de la nature, et à un rythme social et professionnel moins effréné que dans un milieu urbain où une vie de bureau statique prédomine.

De fait, dès les premiers mouvements de respiration et les premiers exercices sur le souffle, les individus se découvrent, semblent réaliser qu’il y a « autre chose », plus « profond » dans leurs corps. Lorsqu’une inspiration passe de 4-5 secondes à plus de 10, le rythme du corps change, et lorsqu’une personne fait l’expérience du cycle complet d’une respiration, qui peut prendre 15 secondes, ce rythme change en profondeur.

Ce changement peut s’avérer physiquement douloureux (puisque le diaphragme est sollicité différemment ; les muscles, tendons soutenant les organes internes peuvent s’étirer de manière inhabituelle et plus intensément, etc.), en plus d’être vertigineux au sens propre comme au sens figuré. Au sens propre : l’approfondissement des mouvements respiratoires permet une présence accrue d’oxygène dans le sang (le phénomène de « l’air des cimes qui fait planer ») ; au sens figuré : les pratiquants découvrent qu’ils ou elles « s’ignorent », que leurs corps et leurs rythmes leurs sont comme étrangers, qu’une porte s’ouvre, et cette réalisation (peut-être pas encore une prise de conscience) peut inquiéter – devant « l’ampleur de la tâche », devant des douleurs inconnues, face à la perception de temps « gâché » ou « perdu ».

C’est là que la place du thérapeute et du sophrologue est indispensable car cette présence rassure, guide, soutient, voire explique.


3. La réceptivité aux visualisations


Je me repose essentiellement – mais pas uniquement – sur le retour des clients et clientes pour évaluer l’effet d’une visualisation. Pour que celle-ci soit la plus parlante, j’apporte un soin particulier la toute première consultation – l’ « anamnèse » – au cours de laquelle je recueille les ressources de la personne que je pourrais mobiliser par la suite pour augmenter l’efficacité des outils transmis.

Je rédige la visualisation selon un vocabulaire qui sera accessible à la personne lorsqu’elle sera en état modifié de conscience. Je m’imprègne du rythme et du ton auxquels je déploierai l’outil et la visualisation qui le soutiendra.

Il est possible qu’une personne soit plus sensible à certains outils et certaines visualisations que d’autres : il nous est alors nécessaire de travailler cet outil ou cette visualisation jusqu’au moment où la personne se dise capable de les pratiquer seule.

Il me semble que l’efficacité de ces visualisations ne peut s’apprécier qu’à terme, mais quelques points me semblent évidents désormais :

- Plus une personne pratique, plus son cerveau et les connections neuronales qui s’y trouvent se familiarisent avec les nouvelles stimulations induites par les visualisations ;

- Plus la personne est volontaire et animée par la volonté de prendre sa santé et son changement en main, plus l’impact de la pratique est important ;

- Une préparation préalable du corps (les « inductions physiques ») et des exercices de respirations (« relaxation dynamique ») renforcent la réceptivité par le cerveau des suggestions et visualisations proposées par le thérapeute.


4. La sophrologie comme élément d’autonomisation


Une cliente qui avait développé une dépendance jugée « sévère » par son médecin traitant à un opioïde (la morphine, sous forme de bâtonnet) m’a annoncé deux mois et demi après le début de son accompagnement qu’elle n’y avait plus eu recours depuis une dizaine de jours. Cette personne mettait ce regain d’autonomie sur la (ré)appropriation de sa respiration, qui avait induit un changement de rythme et de métabolisme, et, dans une moindre mesure, aux visualisations qu’elle travaillait.

Cette cliente – aux problématiques complexes – avait entrepris un changement en profondeur qui impliquait une dimension nutritionnelle, psychologique, kinésithérapique, en plus de ses traitements médicaux.

Il me semble que c’est à cette approche globale et à cette prise de conscience de faire des petits pas dans plusieurs directions qu’il faut créditer l’abandon des bâtonnets de morphine. La sophrologie joue là son rôle d’outil multiplicateur ou consolidateur du thérapeute.


Belle journée à chacune et chacun, puisse-t-elle vous être lumineuse

 
 
 

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